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Le 170e régiment d'infanterie
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13 avril 2021

Croutoy (5)

Eglise de CroutoyEglise de Croutoy après les combats.

      On peut alors revenir sur la place de l'Eglise. De nombreux cadavres ennemis  sont allongés, ainsi que dans la cour du poste de secours d'où le Médecin-lieutenant Arnold, ses aides et les blessés rescapés, tous plus ou moins intoxiqués, sont ramenés au P.C.
    La situation n'est pourtant pas rétablie : un côté est dégagé, mais le duel à la grenade et au fusil continue toujours face au nord. Un artilleur de la pièce de 47 est tué à son créneau, une balle en pleine poitrine. Cependant personne ne se décourage. L'ennemi non plus ; son feu est nourri et les minen n'éclatent pas loin. Vers l'est, entre Jaulzy et Sailly, il a réussi à progresser malgré la résistance acharnée des voltigeurs ; les obus des artilleurs et les rafales de mitrailleuses se relayant avec les rafales d'obus. Les efforts de la journée risquent d'être vains et le P.C. de nouveau encerclé sur toutes ses faces.
   Le chef de bataillon est alors prévenu qu'une contre-attaque menée par le 3e bataillon du 26e R.I. (commandant Chapuis) se déclenchera à 21h15. En effet, bientôt commence le tir d'artillerie ; encagement du réduit, merveilleux aussi bien que par sa précision que par sa densité : 4.000 obus sont tirés sur la région par le 8e R.A.D. Vers 21h30, suite au tonnerre des 75 déchaînés, le 26e submerge le village plein de cadavres allemands. Les gars nous saluent au passage et nous ne leur ménageons pas nos remerciements. Cependant le 1/170e n'ayant pas reçu d'ordre de repli, reste en place et guette.
    La nuit semble plus calme. Les hommes exténués – certains n'ont pas dormi depuis trois nuits – veillent sans désemparer. L'activité reprend vers 1h du matin. Les tirs de mitraillettes se font plus denses. On entend de nouveau crier des ordres en face et, sans doute pour voir plus clair, les Allemands incendient une grange. Et, de nouveau, c'est la bataille face au nord et à l'est à la lueur des incendies et des fusées
    Vers 4h du matin, parvient au bataillon et est aussitôt transmis aux unités, l'ordre de se replier sur le Mont Berny Ce mouvement s'effectue non sans essuyer quelques rafales de mitraillettes, heureusement trop hautes. Au cours du trajet, un Messerschmitt, abattu la veille et ayant réussi à se poser presque intact sur le plateau de Croutoy, est incendié par le capitaine Henry et quelques volontaires.
    Après le passage de la ligne tenue par le 26e, le bataillon se regroupe au Mont Berny, prêt à de nouveaux combats mais bien certain de ne jamais oublier ces journées des 8 et 9 juin, pas plus que celle du 9 septembre sur la Blies. Si l'ennemi ne nous a pas fait prisonniers par débordement, c'est bien grâce aux nombreux actes de courage individuels, connus ou ignorés.
    Il ne me reste plus à ajouter encore quelques lignes à ces souvenirs de combats. Le commandant Allemand de l'unité sus-nommée donna l'ordre de mettre le feu à tout ce qui restait du village, par mesure de représailles, après notre départ : glorieux aveu fait au général de France, maire de la localité.
    Le 2 novembre 1940, dirigés par l'abbé Boufflet. Doyen d'Attichy, nous chantions la Marseillaise devant nos morts, et salués par l'occupant. Enfin dernier et cruel épisode, lors des premières exhumations effectuées sur la place de l'église, en janvier et février 1941, nous faisions une bien pénible constatation, autre prélude des monstruosités que nous réservait dans l'avenir le mythe de la force : les corps de la plupart de nos camarades avaient été mutilés, poignets coupés, ainsi qu'en témoigne le lettre du chanoine Boufflet.

Tous ceux qui pieusement sont morts pour la Patrie
Ont droit qu'à leur tombeau la foule vienne et prie…
Et se souvienne.


Camille Pautet
Croutoy, 10 septembre 1950
Mazan, 6 décembre 1985
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